« De plus en plus de pays envisagent de légaliser le cannabis récréatif. Nous devons donc apprendre comment mieux protéger les enfants contre une intoxication au cannabis.» le Dr Daniel Myran. Photo par Elsa Olofsson.Le nombre de visites par mois dans les urgences en raison de l’intoxication au cannabis de jeunes enfants s’est multiplié par neuf après la légalisation du cannabis récréatif au Canada, selon une étude publiée dans la revue JAMA Network Open. Certains hôpitaux avaient déjà signalé des cas d’intoxication au cannabis chez des enfants, mais il s’agit de la première étude qui brosse le portrait de la situation dans l’ensemble du pays.
« Nous avons constaté une augmentation de la fréquence et de la gravité des cas d’intoxication au cannabis chez les enfants de moins de 10 ans après la légalisation du cannabis. La légalisation des produits comestibles de cannabis semble être un facteur clé », affirme le Dr Daniel Myran, auteur principal de l’étude, médecin de famille, spécialiste en santé publique et en médecine préventive et boursier postdoctoral à L’Hôpital d’Ottawa et au Département de médecine familiale de l’Université d’Ottawa.
L’équipe de recherche a examiné toutes les visites aux urgences en Ontario pendant trois périodes : avant la légalisation, après la légalisation des produits et des huiles de cannabis à base de fleurs en octobre 2018, puis après la légalisation des produits comestibles commerciaux de cannabis (par exemple des gélifiés et des chocolats) et d’autres produits vers la fin de janvier 2020.
Pendant la durée complète de l’étude (janvier 2016 à mars 2021), il y a eu 522 visites aux urgences d’enfants de moins de 10 ans en raison d’une intoxication au cannabis. L’âge moyen de ces enfants était de 3 ans et 9 mois.
Bien qu’il n’y ait eu aucun décès, 171 (32,7 %) enfants concernés ont été hospitalisés et 19 (3,6 %) ont reçu des soins intensifs. La plus forte hausse des visites aux urgences en raison d’une intoxication au cannabis a été observée après la légalisation des produits comestibles commerciaux et une plus grande part de ces visites ont été suivies d’une hospitalisation par comparaison aux deux autres périodes (39 % vs 25 %).
Résultats de l’étude
Avant la légalisation (janvier 2016 à septembre 2018)
- Nombre total de visites aux urgences : 81
- Nombre moyen de visites par mois aux urgences : 2,5
- Pourcentage de visites aux urgences suivies d’une hospitalisation : 25 %
Légalisation de fleurs, de graines et d’huiles de cannabis (octobre 2018 à janvier 2020)
- Nombre total de visites aux urgences : 124
- Nombre moyen de visites par mois aux urgences : 7,8
- Augmentation mensuelle moyenne des visites aux urgences par comparaison à la période précédant la légalisation : 3 fois
- Pourcentage de visites aux urgences suivies d’une hospitalisation : 24 %
Légalisation de produits comestibles et d’autres produits (février 2020 à mars 2021)
- Nombre total de visites aux urgences : 317
- Nombre moyen de visites par mois aux urgences : 22,6
- Augmentation mensuelle moyenne des visites aux urgences par comparaison à la période précédant la légalisation : 9 fois
- Pourcentage de visites aux urgences suivies d’une hospitalisation : 39 %
Les chercheurs ont noté que la légalisation du cannabis au Canada s’est poursuivie pendant la pandémie de COVID-19. Ils ont constaté une diminution des visites aux urgences en raison de tout type d’empoisonnement infantile en Ontario pendant la pandémie, sauf dans le cas des empoisonnements au cannabis, qui étaient en hausse. Après la commercialisation de produits comestibles, près de 10 % de toutes les visites aux urgences en raison d’un empoisonnement infantile en Ontario étaient liées au cannabis.
« L’approche de la légalisation adoptée par le Canada visait à prévenir l’augmentation de l’intoxication infantile au cannabis par le truchement de politiques qui limitent la puissance du cannabis comestible, exigent un emballage à l’épreuve des enfants et éduquent les parents et les autres personnes qui prennent soin d’enfants, poursuit le Dr Myran. Malheureusement, les taux observés dans le cadre de notre étude invitent à penser que l’approche n’a pas permis d’atteindre cet objectif. »
« De plus en plus de pays envisagent de légaliser le cannabis récréatif. Nous devons donc apprendre comment mieux protéger les enfants contre une intoxication au cannabis. L’éducation est un point de départ, mais il faut d’autres mesures pour réduire l’attrait des produits comestibles pour les jeunes enfants. Par exemple, il faut imposer des contraintes plus strictes sur l’apparence et le goût des produits comestibles une fois qu’ils sont sortis de leur emballage. »
Si votre enfant consomme du cannabis accidentellement, appelez au Centre antipoison de l’Ontario au 1 800 268-9017. L’intoxication au cannabis chez un bébé et un enfant est une urgence médicale. Composez le 911 si votre enfant est malade ou a de la difficulté à respirer. Il est possible de prévenir une intoxication au cannabis en conservant les produits de cannabis dans un contenant verrouillé à l’écart des autres aliments et boissons et hors de la portée des enfants. Renseignez-vous davantage sur les risques du cannabis et la prévention des intoxications accidentelles.
Des chercheurs de l’ICES, de l’Institut de recherche Bruyère, du Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substances et de l’Hôpital SickKids ont aussi contribué à l’étude.
Financement : L’étude a été financée par l’ICES et les Instituts de recherche en santé du Canada.
Sources des données : ICES, Institut canadien d’information sur la santé, ministère de la Santé de l’Ontario
Référence intégrale : Unintentional Pediatric Cannabis Exposures Following Legalization of Recreational Cannabis in Canada. Daniel Myran, Nathan Cantor, Yaron Finkelstein, Michael Pugliese, Astrid Guttmann, Rebecca Jesseman, Peter Tanuseputro. JAMA Network Open. 7 janvier, 2022
L’Hôpital d’Ottawa est l’un des plus importants hôpitaux d’enseignement et de recherche au Canada et le troisième employeur en importance dans sa région. Inspirés par la recherche et guidés par la compassion, son personnel de soutien, ses chercheurs, ses infirmières, ses médecins et ses bénévoles assurent l’excellence des soins et persévèrent à trouver des solutions aux défis les plus complexes en santé. Affilié à l’Université d’Ottawa, l’Hôpital attire sur ses nombreux campus des esprits scientifiques parmi les plus influents au monde. Grâce au généreux soutien financier de la collectivité, nous continuons d’offrir des soins de calibre mondial avec une compassion digne des personnes qui nous sont chères. www.irho.ca
L’Université d’Ottawa : Un carrefour d’idées et de cultures
L’Université d’Ottawa compte plus de 50 000 étudiants, professeurs et employés administratifs qui vivent, travaillent et étudient en français et en anglais. Notre campus est un véritable carrefour des cultures et des idées, où les esprits audacieux se rassemblent pour relancer le débat et faire naître des idées transformatrices. Nous sommes l’une des 10 meilleures universités de recherche du Canada; nos professeurs et chercheurs explorent de nouvelles façons de relever les défis d’aujourd’hui. Classée parmi les 200 meilleures universités du monde, l’Université d’Ottawa attire les plus brillants penseurs et est ouverte à divers points de vue provenant de partout dans le monde.
À propos de l’Institut de recherche Bruyère
L’Institut de recherche Bruyère, l’organe de recherche de Bruyère, aspirons à trouver de nouveaux moyens d’optimiser la qualité de vie des gens, de leur apporter une aide pendant leur séjour et de leur permettre de rentrer à la maison. Afin d’y parvenir, nous menons des recherches rigoureuses à comité de lecture, concevons et faisons l’essai de nouvelles technologies capables de redonner aux gens de leur mobilité et de leur autonomie. Notre objectif principal est d’améliorer les systèmes de soins de santé, de faire face au vieillissement mondial et de trouver de nouveaux moyens de prendre soin des gens et de les traiter. Nous sommes fiers de nos partenariats avec le secteur privé, le milieu universitaire, le gouvernement et les groupes de patients et de familles, et nous adoptons toujours une optique d’équité dans notre travail. Nos forces en matière de recherche concernent les soins gériatriques et de réadaptation, les soins primaires, les soins palliatifs, les soins en résidence, les soins de la mémoire, le tout dans un souci d’équité et d’efficacité.
Au sujet de l’ICES
L’ICES est un organisme indépendant et sans but lucratif qui utilise les renseignements sur la santé de la population pour générer des connaissances sur un vaste éventail de problèmes de santé. Ses données probantes non biaisées renseignent sur le rendement du système de santé, en plus d‘aider à comprendre les besoins de santé en pleine évolution des Ontariens et de stimuler les discussions sur des solutions pratiques pouvant optimiser nos ressources limitées. Les connaissances de l’ICES, reconnues pour leur qualité au Canada et à l’étranger, sont largement utilisées par les gouvernements, les hôpitaux, les planificateurs et les médecins au moment d’élaborer des politiques et de prendre des décisions en matière de soins. Suivez l’ICES sur Twitter : @ICESOntario
Personne ressource pour les médias
Amelia Buchanan
Spécialiste principale des communications
Cell. : 613-297-8315
ambuchanan@ohri.ca
Niveen Saleh
Directrice des communications
ICES
647-828-8757
niveen.saleh@ices.on.ca