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Le mystère entourant la myéline est élucidé : des scientifiques d'Ottawa sont les premiers à découvrir comment se produisent les lésions à cet isolant électrique du cerveau

Ottawa, le 21 décembre, 2005

La myéline, c.-à-d. la membrane grasse qui enveloppe les fibres nerveuses du cerveau, est la principale cible de la sclérose en plaques (SEP), mais la cause des lésions à la myéline est demeurée un mystère depuis des décennies. Or, dans une publication anticipée en ligne de la revue Nature (numéro du 21 décembre), des scientifiques de l'Institut de recherche en santé d'Ottawa (IRSO) semblent avoir résolu cette énigme. Ils démontrent, pour la première fois, que la myéline contient des récepteurs spécialisés pour le neurotransmetteur glutamate. Leur recherche démontre en outre que des composés qui bloquent ce récepteur peuvent grandement réduire les atteintes à la myéline. Cette découverte pourrait un jour mener à de nouveaux traitements pour la SEP, les accidents vasculaires cérébraux ainsi que les traumatismes cérébraux et médullaires.

« La myéline s'apparente à la gaine de plastique qui isole les fils de cuivre, explique le Dr Peter Stys, l'auteur principal de l'article. Le cerveau transmet des signaux électriques à l'aide de fibres nerveuses plutôt que de fils de cuivre, et la myéline est la substance grasse qui forme une gaine autour de ces fibres afin de les isoler et les protéger. » Le Dr Stys est scientifique principal du Programme des neurosciences à l'IRSO, professeur de médecine à la Division de neurologie de l'Université d'Ottawa et médecin à la Division de neurologie à l'Hôpital d'Ottawa.

Le Dr Stys et la Dre Ileana Micu, associée principale de recherche dans le cadre de ce projet, soupçonnaient que le calcium intervenait dans les dommages causés à la myéline, mais ils ont dû inventer une nouvelle technique pour mettre leur hypothèse à l'essai.

« Il est très difficile d'étudier la myéline in vivo, explique la Dre Micu. Nous avons donc élaboré une technique unique qui consiste à utiliser des microscopes à balayage laser de pointe qui, pour la première fois, permettent aux chercheurs de mesurer les changements des taux de calcium dans les fins espaces qui se trouvent dans les gaines spiralées de myéline. Nous avons eu recours à la privation d'oxygène pour endommager des fibres nerveuses que nous avons isolées, et nous avons découvert, en fait, que les taux de calcium augmentent dans la myéline. Mais la grande surprise a été de découvrir qu'un composé connu pour provoquer le blocage d'un récepteur de glutamate pouvait inhiber cette élévation des taux de calcium et, ce faisant, réduire grandement tout dommage à la myéline. »

La présence de ce récepteur de glutamate spécialisé, appelé récepteur NMDA (N-méthyl-D-aspartate), dans d'autres parties du cerveau est connue depuis trente ans déjà, mais c'est la première fois qu'on a réussi à le déceler dans la myéline. Dans le cas d'états pathologiques tels que les accidents vasculaires cérébraux, on sait que les neurones libèrent le glutamate, mais dans les maladies immunitaires telles que la SEP, le Dr Stys croit que le glutamate provenant de cellules inflammatoires peut causer directement des atteintes à la myéline.

Le Dr Stephen G. Waxman, professeur de la chaire Bridget Flaherty et titulaire de la chaire de neurologie à l'École de médecine de l'Université Yale, étudie la myéline depuis de nombreuses années et il croit que cette découverte pourrait s'avérer un facteur clé dans la lutte contre la SEP.

« On sait depuis plusieurs décennies que, chez les personnes atteintes de SEP, la myéline et les oligodendrocytes qui fabriquent la myéline dans le cerveau et la moelle épinière sont lésés. Or, ce que l'on ignorait c'est la façon dont ces lésions se produisent, notamment quelles molécules interviennent, comment elles interagissent et comment la myéline est endommagée, déclare le Dr Waxman. Ces plus récents travaux de recherche réalisés par le Dr Stys et ses collègues offrent une perspective nouvelle et importante à ce sujet, et ont permis de déceler une nouvelle molécule qui pourrait devenir une « cible moléculaire » dans notre recherche en vue de trouver de nouvelles thérapies plus efficaces pour la SEP. »

La myéline, conjointement avec les fibres nerveuses qu'elle enveloppe et les cellules de soutien connexes, porte communément le nom de " matière blanche " en raison de son contenu élevé de substance grasse qui fait qu'elle est beaucoup plus pâle que la « matière grise » du cerveau qui est mieux connue. Selon le Dr Antoine Hakim, directeur du Programme des neurosciences à l'IRSO, cette recherche permet de jeter un nouveau jour sur la matière blanche.

" Il s'agit d'une recherche importante, précise le Dr Hakim. Elle met la myéline sur un pied d'égalité avec d'autres futurs traitements, et ce travail donnera lieu à une réévaluation en profondeur de notre démarche visant plusieurs maladies qui mettent en cause les lésions de la matière blanche.

Ce projet a été financé par le National Institute of Neurological Disorders and Stroke (NINDS), les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), le Centre de recherche et de traitement des AVC de la Fondation des maladies du cœur de l'Ontario, une bourse pour chercheur de carrière de la Fondation des maladies du cœur de l'Ontario, l'Institut canadien pour les innovations en photonique (ICIP), ainsi que des donateurs privés de la collectivité locale.

L'Institut de recherche en santé d'Ottawa (IRSO) est l'établissement de recherche de L'Hôpital d'Ottawa et de la Faculté des sciences de la santé de l'Université d'Ottawa.

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